Bienvenue sur Sinequanon
«
Te souviens-tu ?
Les torrents de vapeur
jaillissant de la base d’une immense chute d’eau dans les profondeurs
d’un canyon de la Sierra, des gouttelettes rafraichissantes sur ton
visage alors que tu écoutes les eaux rugir et regardes le ciel au
travers d’un arc en ciel suspendu et inaccessible.
Souviens-toi aussi
des moments où tu contemples un canyon désert dans l’air du soir,
entendant seulement l’appel d’un corbeau solitaire au loin, ou encore de
parois rocheuses se perdant dans un gouffre si profond que ses abimes
s’évanouissent, et que vous plissez les yeux dans la lumière ambrée
d’un soleil couchant.
Sans oublier les moments où ce petit renard roux,
ou peut-être s’agissait-il pour toi d’un raton laveur,
d’un coyote ou d’un daim, qui traversant ton chemin d’un pas
tranquille, s’immobilise longuement en regardant dans ta direction dans
une indifférence prudente, avant de poursuivre sa route, tandis
qu’assis sur une corniche de grès, à l’écart de la piste, les bottes
humides de rosée, tu inspires profondément l’odeur riche des pins.
Souviens-toi des sensations ressenties alors et tu sauras, tout comme
moi, qu’une présence irréductiblement non humaine était en ces lieux,
quelque chose de profondément Autre que toi même.
»
William Cronon,
Le Retour à la Wilderness ; ou, le problème de la mauvaise nature